Djabril Boukhenaissi est un artiste émergent. Diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts, Djabril expose ses œuvres à Paris et à Berlin. Fuite du temps, mémoire et réminiscence sont au cœur de sa démarche artistique. L’alliance de la peinture à l’huile et de pastels secs permet l’émergence d’un « lointain, si proche soit-il » (W. Benjamin).
CONSCIOUS. Pouvez-vous nous présenter votre parcours et votre démarche artistique en quelques mots ? Avez-vous des influences artistiques ? Si oui, quelles sont-elles ?
Djabril Boukhenaissi. Je me suis formé à la peinture et à la gravure aux beaux arts de Paris et à l’UDK de Berlin. Ces deux pratiques sont aussi importantes à mes yeux et je consacre autant de temps à chacune d’elles bien qu’elles ne soient pas miscibles dans mon cas. J’essaie de produire des choses en gravures qui n’ont rien à voir avec ce que je fais en peinture. Je regarde beaucoup Charles Meryon, qui est un graveur oublié mais extraordinaire. En peinture, je suis très influencé par la peinture de Chardin, qui est le peintre que j’ai le plus reproduit et que je regarde le plus. Pour autant, je me sens plus influencé par la littérature que par la peinture. Il y a des pages de Woolf ou de Pessoa par exemple qui me semblent décrire plus fortement qu’en peinture les sujets qui m’intéressent.
CONSCIOUS. Walter Benjamin définit son concept d’aura comme « l’apparition unique d’un lointain si proche soit-il ». Pensez-vous que cette définition puisse exprimer vos œuvres ?
D.B. La question de l’aura de Benjamin est une question compliquée, car c’est une notion souvent mal comprise, et d’autant plus aujourd’hui où ce texte nous semble avoir plus que jamais une actualité. Mais si vous comprenez ce morceau de phrase comme le cliché d’une réminiscence alors oui, c’est assez proche de ce que je cherche à faire.
CONSCIOUS. Pourquoi cette captation du temps vous est-elle si chère ? Pensez-vous qu’il soit possible de la matérialiser ?
D.B. Non je ne pense pas que ce soit possible, et c’est cela qui m’intéresse car c’est là qu’intervient la notion de jeu. Le temps est une entité impossible à définir, qui n’a d’ailleurs pas de définition fondamentale. C’est plutôt la disparition à travers le prisme du temps qui m’intéresse: ce que nous pouvons faire avec un objet qui disparait. Ici il s’agit de souvenirs intérieurs, mais cela peut concerner d’autres objets. La seule chose dont je sois sûre pour le moment, c’est que je veux conserver la résonance entre peinture à l’huile et pastel pour évoquer ces questions là. Ça m’a pris beaucoup de temps de trouver un moyen de faire coexister ces deux matériaux et je pense que la porosité du pastel peut-être essentielle pour évoquer à la fois le temps et la disparition des objets qu’il implique.
L’exposition Mélodie du souvenir avec les œuvres de Djabril Boukhenaissi aura lieu à CONSCIOUS du 12 octobre 2023 au 12 janvier 2024.
Entretien réalisé par Clémence Hénin.